Yann Castanier, photojournaliste : apporter de la plus-value aux rédactions

Yann Castanier est photojournaliste. Diffusé par Hans Lucas depuis 2015, il couvre l’actualité politique (notamment le Rassemblement National) et réalise aussi des reportages au long cours pour le quotidien Libération

C’est en couvrant le génocide au Rwanda qu’il a fait face à une profonde remise en question. Il a alors repris ses études en relations internationales. Puis il a évolué vers une étude de l’extrême droite, qui, selon lui, reproduit les mêmes discours de haine que les génocidaires rwandais. 

Dans ce nouvel épisode du podcast, vous allez apprendre :

  • L’importance du positionnement journalistique (4’’20)
  • Comment trouver l’équilibre entre différentes activités  (49 »53)
  • L’état du marché de la presse aujourd’hui  (1’06 »40)
  • Comment développer une vision d’entrepreneur (1’12 »14)

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L’importance du positionnement journalistique 

Selon Yann Castanier, l’objectivité dans le photojournalisme n’existe pas : « Cadrer comme ceci plutôt que comme cela, c’est déjà faire un choix. » Il préfère donc parler plutôt d’honnêteté dans le travail afin de maintenir un certain pacte de confiance avec le lecteur. Sa vision est celle de quelqu’un qui doit raconter le monde et permettre aux lecteurs de se positionner. Il s’attache à lire la presse de différents horizons éditoriaux afin de garder une bonne ouverture d’esprit.

Pour autant, Yann Castanier considère que son rôle n’est pas de prendre parti : « la différence entre un militant et un journaliste, c’est qu’un militant prend une part active dans la vie du mouvement, dans sa communication et dans son action tandis que le journaliste aura toujours un esprit critique, quel que soit le parti concerné. »

Le site Internet de Yann Castanier

Selon lui, si les journalistes sont pris pour cible, c’est parce que les gens estiment qu’ils appartiennent à une élite financière ou économique. Pourtant, le photographe est pigiste ;  lorsqu’il prend un mois de vacances, il ne travaille pas. Il nous donne l’exemple de son CA mensuel qui s’élève alors à 150 € (exemple pris sur l’année 2018). Son meilleur mois, la même année, est de 4500 € mais cela lui sert finalement à compenser les mois durant lesquels il travaille moins.

Trouver l’équilibre entre différentes activités

Yann Castanier nous détaille ses trois statuts. Il est salarié pour la presse. Il est affilié à l’AGESSA pour son travail d’auteur et il est auto-entrepreneur pour tout ce qui est prestation aux particuliers (photo de mariage notamment), prestations corpo (entreprises et ONG)  et pour son activité de formateur. Faute de carte de presse, sa couverture principale était l’AGESSA en 2018. En effet, le faible seuil (3000 euros bruts) permet une meilleure prise en charge en cas d’imprévu ou d’accident, en comparaison avec le statut de pigiste, où le seuil est de 20 000 euros bruts. 

Concernant ses reportages, Yann Castanier nous confie qu’il travaille souvent avec les mêmes rédacteurs, notamment Tristan Berteloot, spécialiste du RN chez Libération et Robin d’Angelo avec lequel il a proposé certains sujets pour différents titres de presse : Libération, Society, etc…

L’important est de garder à l’esprit les « 5 W » du journalisme, de présenter le sujet en pyramide également. Il est nécessaire d’apprendre ces bases, parfois en suivant des formations courtes, même si les écoles proposent de la pratique et du réseau. En revanche, en passant par les écoles, il faut garder un esprit critique pour éviter de se laisser trop influencer.

L’état du marché de la presse aujourd’hui 

En dépit de la crise de la presse, il est possible d’en vivre encore, même si la profession s’est largement paupérisée ces dernières années. Cependant « notre métier est toujours vivant car nous vivons dans un monde de l’image ». Il explique qu’on n’a jamais vu des portfolios de 6 pages faits à l’iPhone par des amateurs. Les tarifs des photos de presse baissent sans cesse, ce qui est un vrai problème. Ce sont les pigistes qui supportent l’essentiel de la baisse des ventes des titres de presse, « ce qui est anormal », précise-t-il. 

A compter de 2015, il lui est arrivé de travailler pour la presse étrangère. Dans ce cas, il travaille à la commande et salue les rapports cordiaux qu’il entretient avec eux, notamment grâce à la très bonne réactivité des iconographes étrangers.

Site web Yann Castanier Photojournaliste
Extrait du travail de Yann Castanier sur son site web

Quant à la carte de presse, il lui reconnaît une valeur précieuse car elle lui permet de travailler de manière plus sereine et plus confortable, notamment lorsqu’il est en reportage sur une manifestation. Mais il considère que son attribution n’est pas forcément logique. Il aimerait que le comité d’attribution du sésame soit plus attentif aux travaux fournis par les journalistes. Il nous rappelle que pour avoir sa carte de presse, il faut que 51% des revenus proviennent du travail de presse. Yann Castanier déplore en revanche que le temps passé sur les sujets de presse ne soit pas pris en compte, et que seuls comptent les revenus. 

Comment développer une vision d’entrepreneur ?

Le photojournaliste reconnaît qu’il se voit comme un entrepreneur, en dépit du fait qu’il n’a pas du tout évolué dans ce milieu. Ses parents sont en effet fonctionnaires tous les deux. Il apprécie plus que tout sa liberté et le fait de ne pas avoir de compte à rendre à un employeur. Il adapte ses horaires de travail en fonction de ses besoins et envies. 

Le fait d’être entrepreneur permet d’apprendre tout un tas de compétences, notamment dans la négociation et la définition de ses tarifs. Faire son réseau à Sciences-Po lui a donné l’opportunité, avec d’autres camarades de promotion, de créer une saine émulation. De même, cela lui a permis de décrocher de bons contrats. Le reste de ses compétences d’entrepreneur, il les a acquises au fil de ses années de pratique. 

Pour éviter tout malentendu dans ses relations de travail, il explique qu’il a développé des aptitudes dans la rédaction de mails très procéduriers et factuels, notamment lorsqu’il s’agit de se faire payer. Le fait qu’il ait une bonne assistance juridique lui permet de voir venir.

En conclusion, il conseille à tous les photographes de se spécialiser dans une thématique. Il est essentiel, aujourd’hui, d’être identifié par les rédactions comme un professionnel apportant une plus-value. 

Toutes les informations utiles de l’épisode

Yann Castanier

Les photographes cités dans l’épisode

Robin d’Angelo
Tristan Berteloot

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Fred Marie
Photoreporter professionnel, auteur du livre et du blog "Photographe Stratège"
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