Photographe pro : comment et combien facturer ?

Avant de commencer, il faut mettre les choses aux points : je ne suis ni comptable ni fiscaliste. Il s’agit de professions réglementées et ceux qui vous vendront une prestation dans ce domaine sans diplôme ni appartenance à l’ordre ne sont pas dans légalité.

Je suis photographe depuis une dizaine d’années et ce que je partage sur ce blog et dans mes podcasts sont des conseils de bons sens, des méthodes de travail personnelles qui fonctionnent et qui ont été validées par un expert-comptable quand c’est nécessaire.

Cet article devait être initialement une partie de mon programme payant, le Club des Stratèges, qui forme et accompagne des professionnels de l’image désireux de vivre durablement de leurs activités.

Cependant, à force de voir les nombreuses questions que se pose les photographes sur la question de la tarification et de la facturation sur les réseaux sociaux, je me suis dit qu’il serait bien pour tout le monde d’avoir une ressource de référence qui réponde une bonne fois pour toutes à un maximum d’interrogation.

Cet article sera bien entendu amélioré et enrichi au fil du temps et de vos retours. Alors n’hésitez pas à me dire ce que vous en pensez par mail ou sur les réseaux sociaux.

Désolé pour cette longue, mais nécessaire introduction, c’est parti pour les réponses à vos questions les plus fréquentes

Quel est le meilleur statut pour mon entreprise ? SARL, autoentrepreneur, SAS, artiste-auteur ?

Première chose à comprendre : autoentrepreneur n’est pas un statut. D’ailleurs, désormais le bon terme est « microentreprise » et il s’agit d’un régime fiscal simplifié pour les entrepreneurs individuels.

Il existe 3 types de statuts pour les photographes : artisan, auteur ou photojournaliste.

Pour résumer, des avocats en parleront mieux que moi (notamment Joëlle Verbrugge donc je conseille vivement la lecture de ses livres) :

  • Un auteur ne peut vendre que des tirages d’art (limités à 30 exemplaires) et des droits d’auteur. Donc pas d’activité commerciale, par exemple les mariages. Il peut aussi, depuis janvier 2021 vendre des produits dérivés de ses propres photos (et uniquement de celles-ci).
  • Un photojournaliste est payé en salaire via des piges et travaille donc pour une entreprise.
  • Un artisan peut vendre à la fois des droits d’auteurs et vendre des prestations liées à son objet social. Il peut faire du mariage, du corporate, etc.

Ces trois statuts sont cumulables.

Vous comprenez donc que la réponse à la question « c’est quoi le mieux pour moi » ne peut pas trouver une réponse dans un groupe Facebook sans donner plus d’explications sur vos objectifs et vos envies.

Le mieux est d’en parler lors d’une consultation avec un comptable ou un avocat spécialisé.

On m’a volé une photo, que puis-je faire ?

J’ai déjà répondu dans cet article : https://photographe-stratege.com/vol-photo

Une entreprise veut m’acheter une photo, combien et comment puis-je facturer ?

Tout d’abord, on n’achète pas une photo, mais les droits d’utilisation d’une photo. Cette dernière reste votre propriété et vous pouvez vendre encore et encore les droits d’exploitation.

Pour la question du « comment » facturer, il suffit d’avoir un statut professionnel (auteur ou artisan) et éditer une note d’auteur dans le premier cas ou une facture dans le second.

Joëlle explique comment faire les deux pour être dans les clous niveau juridique ici : https://blog.droit-et-photographie.com/factures-et-notes-dauteur-quand-comment-et-conditions-generales

Voici une autre source (gouvernementale cette fois) pour faire vos factures.

Pour la partie « combien » facturer, c’est plus complexe, car il n’existe pas de modèle à copier/coller. Il y a plusieurs étapes pour définir le prix d’une image :

  • Demander au client l’utilisation exacte de la photo (utilisation sur le web ou sur des supports print ? Usage commercial ou éditorial ? Si c’est pour un magazine, quel sera le tirage et la dimension de la photo publiée ? etc.)
  • Il existe des barèmes indicatifs de prix, rédigés par des organismes professionnels tels que l’UPP, la SAIF ou encore l’ADAGP. Voici celui de la SAIF qui est trouvable sur Google en 2 clics. Il suffit de regarder le prix que ces barèmes préconisent pour l’utilisation correspondante, mais gardez en tête que cela ne correspond quasiment jamais à la réalité du marché. Parfois, ce sera trop haut, parfois trop bas. Mais c’est une bonne base pour démarrer une réflexion et une négociation.
  • Référez-vous à vos objectifs et votre business plan. Si vous ne savez pas ce que c’est, on apprend à le faire ici. Vous pouvez définir vos propres tarifs journaliers et définir des « forfaits » pour ce qui est des droits d’auteurs. Par exemple : 100 euros par photo pour le web, 50 pour les réseaux sociaux. À majorer bien entendu « à la tête du client » et surtout de ses statistiques et son chiffre d’affaires.
  • Demandez tout simplement quel est le budget que se donne le client pour acquérir des photos… et faite preuve de BON SENS ! Un client qui vous dit qu’il n’a que 300 euros de budget pour un achat d’images ou une prestation ne va pas miraculeusement trouver plus d’argent parce que vous lui avez dit que ce n’est pas assez cher et que vous êtes un professionnel. S’il vous veut vous et pas un autre, il est possible de négocier, mais si ce n’est pas le cas, il ira tout simplement voir quelqu’un d’autre, et vous aurez perdu la vente.
  • D’ailleurs, toujours dans la catégorie « Bon sens », parfois il est plus intelligent de faire un geste commercial auprès d’une entreprise dans le but de poursuivre la relation de travail et faire du volume, que de vouloir absolument un montant plus élevé sous prétexte qu’un photographe aigri vous accuse de « détruire la profession » sur Facebook.

J’insiste sur ce point parce que lorsque je vois les débats stupides et stériles sur les réseaux sociaux, mes poils se hérissent.

Bien entendu qu’il faut, dans un monde idéal, pratiquer des tarifs élevés et se faire payer le plus possible pour son boulot. Mais nous ne sommes pas dans un monde de Bisounours.

Nos clients sont souvent des entreprises qui ont des objectifs de rentabilités (elles aussi) et qui veulent payer le moins possible leurs fournisseurs. Ce n’est pas un « scandale », c’est juste logique.

Beaucoup de photographes auteurs et photojournalistes semblent oublier qu’il existe un truc assez fondamental qui s’appelle la loi de l’offre et de la demande.

Pour un besoin identifié, il y a des solutions plus ou moins onéreuses. Personne ne vous reproche d’aller faire vos courses alimentaires dans un hypermarché sous prétexte que vous ne faites pas travailler l’épicier au coin de la rue, alors arrêtez d’emmerder les photographes qui acceptent de se faire payer moins que la moyenne et qui ont une stratégie différente de la votre !

Un photographe qui facture 200 euros la prestation de mariage à globalement 2 trajectoires :

  • Soit c’est une activité secondaire et il fait ça pour le plaisir
  • Soit c’est une mauvaise stratégie qui se paiera au moment de payer ses charges et comme énormément d’entrepreneurs qui se lancent en France, il fermera boutique au bout de quelques années (source)

Mon client veut utiliser mes photos pour de nombreux usages (print, web, publicité, réseaux sociaux, etc), si je me tiens aux barèmes de la SAIF and co, le montant devient énorme et le client n’a pas le budget, que faire ?

Il faut toujours négocier plus, surtout quand les usages sont plus nombreux. Cependant, mettez-vous à la place de votre client. S’il lui est impossible de rentrer dans son budget, il ne va pas « inventer » de l’argent magique et passera à autre chose.

Et si vous pensez que ce dernier « peut proposer parce que c’est une grosse boite qui génère un gros chiffre d’affaires », vous n’avez rien compris à l’entrepreneuriat.

Tout est question de ligne budgétaire et de business plan. Une petite start-up paiera parfois plus qu’une grosse boite du CAC40, parce que c’est une question d’attribution de budget. Et ce n’est pas en criant au scandale que ça changera.

Pour répondre à la question, vous êtes libre de refuser le deal… ou de proposer un forfait qui correspond au budget du client. Personnellement si cela ne me demande pas plus de temps ni de travail, j’accepte de gagner de l’argent.

J’envisage de travailler gratuitement pour un client afin de me faire un book et une première expérience, est-ce une bonne idée ?

Dire ça dans un groupe de photographes sur les réseaux sociaux revient à dire « S’il vous plait, insultez-moi ! »

Personnellement je trouve que c’est une idée très intelligente et pragmatique. Maintenant, il faut y mettre la forme. Si on y réfléchit bien, il n’est pas question de travail gratuit dans ce cas de figure, mais bien d’un échange : « je fais des photos de ta boite et tu me donnes l’autorisation de diffuser ce travail et donc de signer une cession de droit à l’image ».

D’ailleurs, tant qu’aucune cession de droit d’auteur n’est signée, les photos réalisées dans le cadre de cette prestation « gratuite » ne sont pas légalement utilisables par le client.

Une façon de faire encore plus intelligente serait de dire « Normalement ma prestation coûte XXX euros de l’heure, mais parce que je souhaite constituer un book dans ce domaine, je t’offre X heures et X photos pour X utilisation précise ».

Cette manière permettra de ne pas se coller tout seul l’étiquette « travail gratos » sur le front et donc de pouvoir potentiellement bosser avec ce client dans le futur et pour un vrai tarif.

#Bonsens

J’ai vendu une photo à un journal (ou un magazine) et ils me demandent une facture parce que je n’ai pas de carte de presse, que faire ?

La loi impose aux entreprises de presse de payer les photojournalistes en salaire, donc en pige. Il y a une exception pour la revente de droits d’auteurs, mais c’est dans un cadre très spécifique. La carte de presse n’est pas obligatoire pour justifier d’un statut de photojournaliste et donc pour être payé en salaire. Si on vous la demande, vous dites qu’elle est en cours de demande et dans 99,9% des cas, il n’y a pas de problème.

Il est possible que des rédactions demandent une « note de pige ». Pas ne panique, c’est comme une facture sur laquelle il suffit simplement de noter ses coordonnées, le montant de la pige et la référence de la publication. Pas besoin de Siret. Je propose des modèles dans le Club des Stratèges.

D’autres questions ?

Envoyez-moi un mail directement : fred@destination-reportage.com et je prendrai le temps de vous répondre.

Comme je l’expliquais au début, je n’ai pas la science infuse et je ne donne aucun conseil juridique. Je partage simplement mon expérience et mes méthodes, car elles fonctionnent.

Ces dernières années, mes photos ont été vendues et publiées à des dizaines de magazines et d’entreprises. Je dirige une structure de 80 photographes professionnels (le Collectif DR) et je donne des cours de photojournalisme à Sciences-Po. Si vous voulez en savoir plus sur les formations que je propose aux photographes professionnels, rendez-vous ici.

Pour aller plus loin et accéder à davantage de ressources, accédez à ma boîte à outils :

Fred Marie
Photoreporter professionnel, auteur du livre et du blog "Photographe Stratège"
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