Photographes, pensez collectif !

Vincent Wartner est photographe et vidéaste. Il a cofondé le collectif Riva Press en 2007 avec 4 photographes. Il travaille pour la presse quotidienne , la presse magazine et la télévision. Il est aussi le cofondateur du Collectif DR, créé en septembre 2019.

Après des études en arts plastiques, Vincent Wartner devient infographiste et travaille pour un grand groupe automobile. En 2007, il suit une formation de 6 mois à l’EMI-CFD, alors dirigé par Wilfrid Estève. 

Il crée, avec 4 autres photographes, le collectif Riva Press, puis devient photojournaliste salarié à 20minutes. « C’était partir dans des conditions top au niveau des frais, accompagné d’un rédacteur ou d’une rédactrice, c’était une façon de travailler que j’ai beaucoup aimé ».

Le marché de la presse étant en perte de vitesse, Vincent retrouve son statut d’indépendant et intègre Hans Lucas quelque temps : « c’était un nouveau challenge, mais je ne m’y suis pas retrouvé complètement. Je suis retourné chez Riva Press ». 

Dans ce nouvel épisode du podcast, vous allez apprendre :

  • L’intérêt de rejoindre un collectif (9 »43)
  • Comment déjouer la concurrence (19 »07)
  • L’évolution de la vidéo sur le marché de l’image (31 »37)
  • La particularité du Collectif DR (15 »10)

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Quel est l’intérêt de rejoindre un collectif ?

« Quand on mettait nos images en agence et qu’on voyait que l’agence prenant entre 50 à 70 % de la vente, on a voulu changer. On a créé un truc qui nous ressemblait et qui est toujours actif aujourd’hui ». Vincent voit dans le collectif la possibilité de mutualiser les ressources, de trouver de l’entraide et surtout d’avoir le contrôle sur la structure pour diffuser et vendre les images en direct aux rédactions. 

Il rappelle à quel point le métier est difficile. « C’est déjà compliqué pour un photographe avec une structure. Pour un photographe sans structure, c’est encore plus compliqué ». L’émulation qu’apporte le collectif est un encouragement à se dépasser. « Se confronter aux autres, ça ne peut être que positif ». 

Publication dans le magazine VSD du 24 Septembre 2015. @Vincent Wartner

C’est une façon d’avoir un retour constructif sur ses propres images et de tester des idées en en parlant avec des collègues. « C’est ce qu’on a expérimenté avec Riva, ça nous a permis de ne pas partir dans tous les sens, de se rencontrer sur ce qui était important. C’est une possibilité d’avoir toujours  un œil critique sur son travail. Ça évite de perdre du temps, de l’argent, ça permet de partir sur un sujet bien préparé. »

La structure permet aussi un accès à certains sujets grâce à la lettre de mission. Ainsi, Vincent nous raconte qu’il est allé 5 fois de suite à la frontière turque pendant la guerre de Kobané. Il n’a jamais réussi à entrer dans la ville : «le fait est que dans les derniers jours où j’étais présent là-bas, ils avaient une zone très près de kobané où on pouvait s’avancer à quelques kilomètres de la ville, on avait vue sur des scènes de guérillas : ce corridor, je n’y aurais jamais eu accès si Wilfrid Estève ne m’avait pas fait une lettre de mission ». 

Les lettres de mission des rédactions sont de plus en plus compliquées à obtenir. « Il faut se débrouiller autrement ». La lettre de mission du collectif est une alternative importante. Elle peut ouvrir l’accès à des événements sportifs par exemple. 

Comment déjouer la concurrence ?

Vincent ne nie pas la concurrence mais y voit autre chose : « les photoreporters, on est tous concurrents mais on se connait tous plus ou moins, il y a vrai sentiment fraternel entre nous, c’est encore plus vrai sur des terrains compliqués ». 

Sur un même sujet, chacun va le traiter à sa manière. « Il y a toujours moyen de s’extraire de la meute ».

« Il y aura toujours dans un collectif, des têtes d’affiche, des gens qui marcheront mieux que les autres mais c’est comme ça, c’est normal ». C’est pourtant un phénomène qui va bénéficier à l’ensemble des membres de la structure. En effet, les rédactions vont venir s’intéresser à ce que produit le collectif et aux profils des différents membres. 

Vincent revient sur son voyage en Guyane. « On m’a proposé de partir sur une expédition en Guyane. J’ai eu 24h pour me préparer pour partir un mois en autonomie totale pour suivre deux scientifiques du CNRS qui allaient à la rencontre des chercheurs d’or clandestins au fin fond de l’Amazonie et le tout protégé par 9 légionnaires du 3ème REI de Kourou ». Il nous détaille les conditions de tournage compliquées dues à la saison des pluies tardives et l’humidité maximale qui a mis à mal le matériel. « Je m’attendais à une grosse aventure mais ça a été plus qu’une aventure, un travail sur moi-même au fin fond de la forêt. Il faut se surpasser, ça ne se joue pas qu’au physique mais essentiellement au mental ». 

Finalement la concurrence représente peu face à sa capacité à se dépasser soi-même. 

Publication dans le journal La Croix du 11 janvier 2017. @Vincent Wartner

L’évolution de la vidéo sur le marché de l’image

« C’est une suite logique dans mon travail. Je ne lâche pas la photo mais c’était une envie que j’avais depuis un moment de basculer en vidéo ». A son retour de Syrie, Vincent a décidé de commencer la vidéo : « le fait est que quand je suis rentré, j’avais un goût d’inachevé parce que j’avais ramené finalement peu de photos, j’avais rencontré des gens qui m’avaient filé des témoignages hyper intéressants, ils auraient eu des sonores à faire ».

Il nous avoue qu’il aurait pu faire des diaporamas sonores mais il aime la complexité que requiert le travail en vidéo. « Le travail se prépare en amont comme en photo mais après il y a un gros travail à faire de derush, de montage, d’écriture de l’histoire, toutes ces choses qui font que c’est assez complet et ça me convient bien de faire tout ce travail de recherche, d’écriture ». 

Pour un documentaire de 52 minutes, Vincent explique que le synopsis est bien plus complexe à développer que pour un reportage photo. Le travail est conséquent. Il faut réfléchir à tous les aspects du documentaire en amont en étant le plus précis possible, « parce que les chaînes ne s’engageront pas si vous restez flous. Ils veulent s’imaginer déjà ce qu’ils vont voir à l’écran ». 

Quant aux budgets alloués à la vidéo, ils sont nettement plus importants que pour la photographie. Le sujet sera rediffusé. Il vit beaucoup plus longtemps qu’un sujet photo. 

Quand on lui demande si la vidéo remplacera un jour la photo, Vincent répond honnêtement : « les rédactions vont de toute façon dans la direction dans laquelle ça peut coûte le moins cher. Effectivement, si on peut envoyer un seul mec au lieu de deux, ça sera peut-être ça bientôt ». D’ici là, il reconnaît que les photographes sont pour l’instant bien identifiés par les rédactions. Il peut arriver qu’on demande au photographe de ramener quelques séquences vidéo en plus de ses photos. « La consommation a changé aujourd’hui, la vidéo capte bien plus de spectateurs qu’une photo ». 

La particularité du Collectif DR 

Vincent insiste sur la part de l’accompagnement chez DR. « On peut très bien aimer travailler seul mais le fait d’avoir quelqu’un derrière qu’on peut contacter en cas de problème, en cas de galère, c’est hyper important ».

C’est l’avantage de ce collectif par rapport à d’autres structures. L’espace de formation est conséquent pour que chacun puisse travailler à son rythme sur les différents aspects de la construction photographique d’une histoire. Même si l’ADN de ce collectif est affiché clairement, l’apprentissage ne se limite pas au reportage (techniques d’écriture, synopsis, vente des images, contacter les rédactions). 

Les profils des membres sont très variés, ce qui permet de créer une émulation très enrichissante. Certains travaillent ensemble sur une thématique, d’autres s’aident pour trouver des sujets. 

Chaque membre à un espace en ligne dédié à son travail. Mais Vincent rappelle qu’il est important d’avoir son propre site internet en plus. 

Toutes les informations utiles de l’épisode

Vincent Wartner

Riva Press

Collectif DR

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Fred Marie
Photoreporter professionnel, auteur du livre et du blog "Photographe Stratège"
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